La volatilité des légitimités

Publié le par Sébastien Leprat

Pour les élections fédérales, le secrétaire général du PDC ne se présentera pas sous les couleurs du parti qu’il dirige. Avec l’assentiment de son Président, Reto Nause sera donc le candidat d’un parti fraichement créé pour la circonstance. Au diable donc la valeur et la qualité d’un mandat politique. Quelque soit la fonction, il est permis de tout dire en tous temps et en tous lieux.

Nous nous habituons aux conseillers fédéraux qui sont les porte-voix exclusifs de leurs partis. Nous nous accoutumons donc au fait qu’ils détournent ainsi leur légitimité issue d’une élection devant le Parlement. Il faudra désormais se faire à l’idée qu’un secrétaire général d’un parti gouvernemental puisse se présenter aux élections sous la bannière d’une autre formation politique. Ainsi va la vie.

Que de tels agissements aient lieu dans l’indifférence générale n’a rien de surprenant. Ces dernières années, les valeurs et les principes de la démocratie représentative reculent au profit du rêve de la démocratie spontanée, du fantasme d’une organisation politique qui gommerait toutes formes d’intermédiaires entre une décision populaire et son application. Dans un tel esprit, les institutions comme les partis ne constituent que des obstacles pour la réalisation des desseins politiques de certains.

Vis-à-vis des institutions, cette réalité populiste est souvent relayée par l’UDC. Aux yeux de ce parti, l’opinion supposée majoritaire de la population devrait s’imposer à l’Etat de droit pourtant solidement, car historiquement, implanté par la vox populi. C’est ainsi que les décisions du Tribunal fédéral sont toujours plus accusées de dénier la démocratie.

Mais cette tendance est aussi parfois amplifiée par d’autres acteurs politiques dans le cadre de leurs fonctions partisanes. Au sens de l’article 137 de la constitution fédérale, les partis politiques ont pour mission de former l’opinion et la volonté populaires. Auréolés de cette reconnaissance constitutionnelle, ils s’organisent afin de déléguer à leurs porte-voix le soin de relayer leurs idées, la mission de promouvoir leurs valeurs, de défendre l’étendard. En bonne intelligence démocratique, ils se dotent donc de statuts qui définissent très précisément les conditions dans lesquelles leurs responsables sont légitimités afin de s’exprimer. Or, parfois, ces responsables ne cultivent pas cette noble vision du fonctionnement démocratique des partis. Il y a ceux qui s’écartent de leurs partis afin de créer des mouvements ou bien ceux qui se mettent en mouvement pour s’écarter de leurs partis. Dans les deux cas, ils démontrent une forme de mépris vis-à-vis de leurs militants, une sorte de condescendance à l’endroit de ceux qui délèguent leur confiance avec la sincère conviction que cette légitimité ne sera pas dévoyée.

Ainsi, relayer l’opinion d’une organisation démocratique dont on a la charge n’est-il pas toujours un reflexe spontané. Ainsi, se multiplie l’idée qu’il ne sert à rien d’élire pour légitimer…

 

 

 

 

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