La harangue pour les langues

Publié le par Sébastien Leprat

Dans les milieux politiques, la logique du procès d’intention progresse. Ainsi, ceux qui s’opposeraient à la loi sur les langues seraient-ils coupables de vouloir briser la cohésion nationale. Les mots sont lâchés, les excès verbaux tolérés. Les zélés dénonciateurs ne reculent devant rien. Pour la défense des langues, ils excellent dans la harangue et accusent à tour de bras ceux qui auraient l’outrecuidance d’émettre des réserves sur l’idée d’une législation fédérale.

Un mot d’ordre s’impose donc : Sans loi fédérale, point de salut ! Peu importe le contenu du texte discuté. Seule compte la portée symbolique du message. L’avant-projet de loi sur les langues, concocté en son temps par madame Dreyfuss et judicieusement enterré par le Conseil fédéral, est pourtant mauvais.

Il est en effet conçu pour légitimer une politique de subventions dont l’efficacité parait plus qu’incertaine. D’autre part, comme il n’apporte aucune réponse sérieuse à la question essentielle de l’enseignement de langues étrangères à l’école, il passe à coté de l’essentiel. L’actualité politique récente démontre néanmoins qu’il existe désormais d’autres moyens plus efficaces afin d’améliorer le sort de nos langues nationales. En mai passé, le peuple vient de modifier la constitution afin d’accorder la priorité à la formation. La question de l’enseignement des langues à l’école primaire est désormais clairement balisée. Si clairement que la conférence des directeurs d’instruction publique (CDIP) a jugé opportun de coordonner les politiques cantonales avant même que les nouvelles dispositions fédérales soient votées. Dans le rapport Harmos, la CDIP propose en effet de débuter l’enseignement de deux langues en troisième et cinquième année de l’école primaire. Les nouvelles dispositions constitutionnelles fédérales précisent que si les cantons n’agissent pas, la Confédération pourra alors les forcer à intégrer cette recommandation. Paradoxalement, les mêmes qui exigent une loi sur les langues sont souvent ceux qui combattent cet article fédéral dans les cantons. Ainsi, dans de nombreux cantons (et notamment dans le canton de Schaffhouse, canton d’origine du Président du PS Suisse), le parti socialiste se bat afin d’exiger l’enseignement d’une seule langue à l’école primaire. Fort heureusement, le peuple a jusqu’à présent renvoyé les camarades à leurs chères études. A en juger par les actuels débats, cela ne les empêche toutefois pas de pratiquer sans complexe la harangue pour les langues...

 

Publié dans politics

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